Echec et mat : rixe
Mes perceptions sont restées les mêmes.
Et pourtant quelque chose s’est depuis longtemps déréglé. Comme un doute. Un décalage. C’est bizarre, car c’est justement la définition littérale de l’illusion : le décalage, c’est-à-dire le jeu qui laisse un peu de mouvement, comme lorsqu’on dit qu’un meuble ou un appareil a du jeu. Cela ne devrait pas être, mais on peut quand même s’en servir. Bref, ça marche, mais ça ne marche plus exactement comme avant.
Quelle est cette illusion ? Celle que le réel n’est peut-être qu’une illusion… Oh, rassurez-vous, ce n’est pas ce vieil argument du rêve que l’on vous a imposé dans les classes anciennes (et c’est bien dommage, car il va plus loin encore, cet argument). Non, l’illusion dont je parle est ce jeu avec la frontière du réel, qu’on appelle le virtuel.
Un mot-corbeille, comme la plupart.
J’ouvre donc la corbeille virtuelle et je restaure pêle-mêle : la potentialité, la force, l’impalpable, le binaire, de la technologie applaudie, du futur fantasmé et des pixels, beaucoup de pixels. Une série un peu artificielle pour guider l’intelligence, non ?
Vais-je intégrer quelques lambeaux de mythologie pour y redonner un peu de corps ? Ou supposer la présence anonyme de forgerons indéfiniment duplicables ? Même pas.
Il me suffit simplement de me rappeler que je regarde un écran, qui cache autant qu’il montre (et inversement). On en revient au codage, et aux Règles pour la direction de l’esprit. Décidément, le premier principe restera solide. Quel que soit le support, il n’en demeure pas moins que je pense. La conscience qui juge vraiment sait qu’elle juge, sans avoir besoin de se le répéter au moyen des fictions les plus alambiquées.
Avant même les avancées informatiques, l’art le plus ancien le disait. D’autres formes de pensée aussi. L’illusion se répète, elle change simplement de format. Rien de plus, et peut-être d’ailleurs avec quelque chose un peu en moins. Mais ce n’est pas vraiment inutile face au confort convenu du familier.
On m’a proposé de jouer. Mais c’est de la fiction qu’on peut se jouer. C’est même fait pour.
La conscience reste : il faudra toujours en passer par elle, même pour l’attaquer.
Elle est la matrice de toute idée, même détournée. Ou en suspens.
Mes perceptions sont restées les mêmes.
(Comment ça, je n’ai pas respecté les règles du jeu jusqu’au bout ? ;-)