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Le Bois de Dendropogon
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17 novembre 2007

La force de Damasio

Cela fait un moment que j’aimerais parler des deux romans d’Alain Damasio, qui m’ont profondément marqué.

Mais à chaque fois que je choisis un angle d’attaque, il n’est pas suffisant pour restituer la force de l’ensemble, et mon désir d’en parler est de nouveau différé.

À partir de là, il n’y a pas quinze mille solutions : soit j’attends encore dans l’espoir d’avoir le temps d’écrire un très long commentaire, soit je prends le tout sans chercher à faire de présentation satisfaisante (mais peut-il y en avoir une, en dehors de la lecture elle-même ?).

Les distinctions viendront plus tard, après les premières salves.

De très nombreux auteurs me plaisent et m’intéressent, mais Alain Damasio est au delà de ça — ou en deçà.

Dire qu’un livre a changé la vie de son lecteur est une formule éculée (d’ailleurs « formule éculée » en est une elle-même ;-)) : disons que ces deux romans m’ont rendu plus vif, à la fois physiquement et intellectuellement.


C’est la lecture de La Horde du Contrevent qui m’a poussé notamment à me mettre à courir : si je m’autorise la vanité de redire que j’ai perdu 17 kg en deux mois, il me faut surtout reconnaître que ma volonté a régulièrement eu besoin d’être portée : c’est ainsi que j’ai cherché à tenir mon rôle de 24ème hordeur, face au vent.

À plusieurs égards, La Horde du Contrevent est une lecture qui se mérite (même si je ne suis pas sûr que ce soit le terme le plus approprié) : mon réveil physique en fut à la fois le prix et la récompense, pour me confronter pleinement à la puissance qui s’en dégage.

La Zone du Dehors (qui est en fait le premier roman d’Alain Damasio) a eu sur moi au moins le même impact que 1984 de George Orwell, dont c’est un prolongement.

Un roman d’anticipation réussi ne décrit pas un monde étranger, dans un avenir lointain : pour bien anticiper, il ne faut quasiment pas le faire. Cerclon, ce régime démocratique qui incite chacun au confort et à la passivité, ce n’est plus une simple menace : on y est déjà (cette présentation donne le ton, ainsi que ce billet).

La Zone du Dehors est un appel qui doit faire sursauter, c’est-à-dire s’élever au-dessus de soi-même, au-dessus de ses habitudes, de sa torpeur. Il faut lutter en permanence contre soi, contre la tendance à admettre la répétition.

Les analyses philosophiques y sont acérées, elles tracent des lignes de force — à la suite de Nietzsche, Foucault et Deleuze qu’Alain Damasio a beaucoup lus. Mais je précise, pour ceux que la philosophie intimiderait au lieu d’attirer ;-), qu’elles font corps avec l’histoire, qu’elles animent les personnages (il ne s’agit pas de longs commentaires abstraits, qui dénatureraient le roman).

Parce que les concepts ne sont pas suffisants pour créer la chair d’un livre, la vie qui surgit de ces deux romans vient du travail impressionnant sur le texte — surtout dans La Horde.

L’inventivité (pourtant originale et variée) dont fait preuve Damasio est presque anecdotique à côté de la recherche sur le style, sur le rythme, ou encore sur le lexique. C’est ce qui fait que le texte a une réelle texture, une consistance, à l’image du vent qui est une énergie, une puissance (et non une image abstraite ou un poids immobile).

Bref, la lecture d’Alain Damasio m’a donné de la force, non pas pour en faire plus, mais pour chercher à faire toujours autrement.

Si vous décidez de découvrir cet auteur, je vous conseille de commencer par La Horde du Contrevent, et d’affronter le tourbillon des premières pages, avec résolution : c’est une entrée brutale, les présentations se font ensuite ;-)

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Commentaires
B
Hello,<br /> <br /> en furetant sur le web à la recherche d'autres lecteurs de la Horde, je suis arrivé chez toi/vous...<br /> Si éventuellement cela t'intéresse de découvrir quelques autres perspectives sur le roman, voici un peu d' auto-pub éhontée:<br /> http://systar.hautetfort.com/archive/2007/07/31/pour-une-definition-du-style-dans-l-imaginaire-lecture-de-la.html<br /> <br /> Amitiés<br /> <br /> Bruno, blog Systar
E
Bonjour Dendropogon,<br /> <br /> J'ai un peu tardé: merci d'avoir mis mon billet en lien. Je suis d'accord avec toi: je ne vois pas de juste milieu entre un billet fort imparfait sur les romans de Damasio et leur lecture.<br /> Je n'avais d'ailleurs pas fait de note du tout sur La Horde: j'étais trop submergée.<br /> <br /> J'ai lu La Horde en premier, et j'ai été très étonnée, après lecture de la Zone, de découvrir que c'était un roman qui était venu ensuite. Puis, en y réfléchissant, je me suis dit que non, que Damasio avait posé ses bases dans la Zone, qu'il ne lui restait "plus qu'à" explorer les moyens de la volte et du contre.<br /> <br /> Je suppose qu'il va falloir attendre encore quelques temps le prochain roman: l'auteur est du genre à peaufiner... et tant mieux.
D
@ Soslan : Bonne lecture ! Promis, je n'oublierai pas de t'en reparler ;-)<br /> <br /> @ Laegalad : Je ne me rappelle pas non plus qu'on en ait déjà discuté (j'ai d'ailleurs beaucoup plus de choses à en dire que sur HP VII, par exemple ;-)) Mais il est effectivement préférable de ne pas le faire ici, afin de ne pas leur gâcher le plaisir de la découverte ;-)<br /> Que Caracole soit ton personnage préféré ne m'étonne absolument pas :-)<br /> <br /> @ L@urence : Il n'y a pas de piège, juste l'invitation à partager cette belle expérience de lecture :-)
L
je me sens petite, toute petite ... minuscule .... microscopique ... invisible ...<br /> sur des sujets comme ça, tu sais bien me piéger !!! je ne sais que dire ... je repars toute penaude !!!!<br /> :>))
L
Aaaah... La Horde... et Caracole, Caracole, le Ménestrel dans toute sa splendeur... LE personnage clé de l'histoire, à mon sens, avec tout le brio et la noirceur qu'il convient à un homme d'art, l'ennivrance du vent et les intuitions profondes... Caracole, oui, Caracole... est-ce étonnant qu'il soit mon préféré, finalement ? :D <br /> <br /> La Horde est le seul bouquin que j'ai lu de Damasio, mais pour me motiver à me tuer à courir, il faudra plus que ça, je crains, mon aversion pour tout ce qui s'apparente à me presser est trop profonde ;) Par contre, certaines images m'ont durablement marquée, parlée comme peut me parler Bachelard, comme peut me parler ce que j'appele les rêves-images, ces images si puissantes de l'inconscient qu'elles laissent pantois.<br /> <br /> J'ai envie de le relire, tiens... Pas ce soir... je tourne en rond avant le concert d'Andrew Bird ;) Mais oui, oui... retrouver le Contre. Oh, on pourra en parler de celui-ci -- l'a-t-on déjà fait, je ne me souviens plus ? J'ai certainement dû te dire que j'étais en train de le lire, à un moment. ça m'évitera d'en dire trop ici ;)<br /> <br /> Sosryko, en achetant le bouquin, prend garde à ce qu'il y ai le marque-page avec. Très utile, ce marque-page... ;)<br /> <br /> (vérification faite : il est resté chez mes parents dans un carton. Heureusement qu'ils me les remontent demain !).
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